Barge: Le nouveau gastro comme à la maison
Article du Elle Begique:
A lire ici: https://www.elle.be/fr/270278-barge-le-nouveau-gastro-comme-a-la-maison.html
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Une nouvelle table classe et chaleureuse dans un coin étonnant du centre de Bruxelles. Ils sont « Barge » et on est déjà fous d’eux.
Les tables étaient dressées, mais l’adresse pas encore officiellement ouverte il y a une semaine quand on y avait passé une tête curieuse — et étonnée. C’est que dans cette portion de ville un peu bâtarde entre le quartier Sainte-Catherine et le métro Yser, peu s’étaient osés à ouvrir autre chose qu’une épicerie de quartier. Il y avait bien eu Dame Jeanne, un coffee shop un peu perdu, mais toujours rempli.
Désormais, en lieu et place, on trouverait ce « Barge ». Une assiette, un couteau et ce nom sur la vitrine, pour un intérieur qui a gardé le bon goût des occupants précédents : un long bar en béton lissé, des murs en briques rouges rafistolés et ce large carrelage façon réfectoire d’école. Pas de doute, on est bien dans l’esprit bruxellois ! Le reste empreinte à l’esprit champêtre des nouveaux propriétaires, avec des tables en teck recyclé, des assiettes cerclées et quelques épis de blé.
Mais laissons à Barbara Hoornaert et Grégoire Gillard, l’équipe barge accompagnée de Julie Collard, ces quelques souvenirs de leur passé à Liernu, histoire de rendre la transition plus facile.Le duo a quitté les cuisines et le service de l’Air du Temps**, le restaurant bucolique et haut de gamme de Sang-Hoon Degeimbre, pour ce coin bruyant de la capitale. Lui après quatre ans comme sous-chef et bras droit culinaire et elle, comme sommelière-en-chef. Avant ça, il y a eu l’Eau Vive, le Coq aux Champs ou encore le Comme Chez Soi ou le Louis XV d’Alain Ducasse — un parcours qui en jette pour ces jeunes de 29 et 30 ans.
Mais chez Barge et loin de la pression des étoilés, ils tombent les masques. On craque pour ce duo coloré, ambitieux et spontané, comme les assiettes de ce soir, cinq services encore en rôdage, mais qui dévoilent toute la technique de Grégoire et les beaux contacts de la paire. Le maquereau brûlé est brut et frais, un plat qui éveille les sens et nous pousse à nous concentrer sur ses saveurs cachées. On le comprend tout de suite : ici, tout se joue dans la subtilité et pour une fois, l’expérience est réelle — là où trop de nouveaux restaurants la citent sans arrêt sans qu’on la trouve vraiment.
Une fleur de légumes crus ensuite — un brin ascétique cette fois —, avant la belle surprise de la soirée : l’assiette de chou-rave et crevettes en étages, belle et étonnante, qui évolue jusqu’à la dernière bouchée. On s’extasie jusqu’à la dernière bouchée avant de saucer la fin du plat. C’est qu’on y retrouve le fameux jus lacto-fermenté, un classique de la cuisine de San Degeimbre. Et ça, pas question d’en perdre une miette — ou plutôt une goutte.
C’est le tour de la pièce de viande, un veau de Lothar, éleveur ultra-protecteur wallon. La bête a été achetée entière, promettant chaque soir, ou presque, une assiette différente. En accompagnement, de l’épeautre fermenté, des oignons au café, des pommes de terre fumées au foin et une sauce barbecue maison. C’est dans le mariage de tous ces ingrédients que la perfection du plat se révèle. Du coup, n’hésitez pas pour la grosse bouchée.
Barbara ne vous en voudra pas, elle qui passe entre les tables pour servir son accord de vins. Des quilles européennes uniquement, bio au minimum, parfois natures, dégotées par Les Sens larges à Hannut. Des découvertes qu’elle aime, ça se voit, et suffisamment légères pour ne pas vous faire sortir du restaurant en titubant — cinq verres, tout de même. Elle en profite pour glisser les noms des producteurs de tous les ingrédients, dès qu’elle les connait. Et elle en connait beaucoup. Parce que c’est aussi la philosophie naturelle du restaurant : des produits soigneusement choisis en Belgique, et qui ont une histoire. Résultat : tout, de la décoration aux assiettes, en passant par les vins, est cohérent. Subtil aussi, avec un travail intéressant autour du cru. Chaleureux surtout, et ça, forcément, on aime.